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CSP : Un grand acquis qui n'est plus à l'ère du temps

La Tunisie célèbre aujourd'hui la commémoration du 64ème anniversaire de la promulgation du Code du statut personnel et la fête de la femme tunisienne.


Le 13 août de chaque année est une occasion de se rappeler les acquis de la femme tunisienne qu'elle a réussi à obtenir au fil du des années, d'évoquer son rôle dans la société active, pas seulement en tant que mère et épouse qui sait se sacrifier pour sa famille, mais en tant qu'"actrice" et productrice économique qui donne l'exemple en maturité, en application et en rendement et de se réjouir de la place qu'elle occupe, désormais, dans les différents secteurs où elle dépasse -ne serait-ce qu'en nombre- l'homme (études supérieures poussées, médecine, enseignement, journalisme...), méritant ce dont elle jouit en termes de libertés et de droits à nuls autres pareils dans les pays arabes et musulmans, et même sous d'autres cieux de par le monde.


Hadded, Bourguiba et d'autres...


Cela n'aurait pu être sans des leaders de pensées éclairés, avant-gardistes qui ont eu le courage, dès les premières décades du siècle dernier, de défier une société dont le conservatisme était nourri par un colonialisme sectaire et opprimant. Tahar Hadded et d'autres ont revendiqué le droit de la femme à l'éducation, à la parole, au choix...bref, à la vie.' Cest ainsi que quelques familles qui en avaient les moyens, ont fait accéder leurs filles à l'école, leur permettant de pousser au maximum leurs études. Tawhida Becheikh, devenue bien avant l'indépendance, la première médecin arabe, en est un exemple frappant, mais pas unique.


Seulement, cette émancipation qui ne trouvait pas de répondant dans la société et qui dépendait du bon vouloir de quelques parents, avait besoin d'une réelle révolution et d'une assise politico-juridique pour changer réellement la situation de la femme et amener les mentalités à commencer à accepter l'idée de son droit à ne pas rester condamnée à passer du joug du père et du frère à celui du mari, d'aspirer à se prendre en charge et à tendre vers une égalité avec l'homme.


Cela, c'est le leader Habib Bourguiba qui l'a compris et qui a osé le faire, avant même qu'il ne devienne président et que la Tunisie ne se convertisse du régime monarchique à celui républicain. En effet, le 13 août 1956, alors qu'il était Premier ministre du Bey, il faisait promulguer, après concertation avec des sociologues et des théologiens éclairés de la Zeïtouna, le révolutionnaire Code du statut personnel (CSP) qui accordait à la femme moult droits, l'installait sur la voie pour devenir l'égale effective de l'homme et qui, entre autres, abolissait la polygamie. Une première dans le monde arabe qui sera décriée à l'intérieur comme à l'extérieur du pays, avant d'être admirée et citée, au fil des ans, comme exemple et comme objectif à atteindre. 


Le bémol...


Et si le CSP a été sans cesse conforté au cours du demi siècle suivant, par un arsenal juridique, il est désolant et même révoltant de voir qu'il y a encore, de nos jours, des femmes qui peinent à arracher leurs droits les plus élémentaires, les plus basiques, notamment dans les zones défavorisées de l'intérieur , et dont la voix ne parvient apparemment pas assez aux autorités, aux médias ou aux pages des réseaux sociaux. Des femmes battues, des filles torturées, des mères célibataires abandonnées, des mineures poussées dans les rues à mendier, d'autres exploitées dans les maisons à faire le ménage, ou encore des petites privées de leur droit à l'école et par la suite au travail.


La Tunisie n'a malheureusement pas fait que des femmes cultivées qui ont eu la chance d'accéder à l'éducation et aux études supérieures pour, enfin, occuper des postes qui leur permettent d'avoir un niveau de vie correct, pas que des femmes qui savent se défendre et recourir à la justice en cas d'abus et pas que des femmes qui sont financièrement indépendantes.


La Tunisie est, malheureusement, autre dans les régions où on fait comprendre à la femme depuis son jeune âge qu'elle appartient à une catégorie inférieure... condamnée à être soumise à la gent masculine, qu'elle aura beau batailler et lutter pour ses droits, elle n'égalera jamais l'homme. Une société de misogynes qui ne fait qu'approfondir l'écart entre les deux sexes et que certains courants obscurantistes essaient ouvertement, depuis une décade, d'ériger de nouveau en modèle.


Certes, le Code du statut personnel, entré en vigueur le 1er janvier 1957 constituait et constitue toujours une source de fierté, mais est -il encore, 64 ans plus tard, à l'air du temps ? Ses disposistions ne sont-elles pas dépassées, face au terrain que perd la femme au quotidien ? Une bonne mise à jour ne s'impose-t-elle aujourd'hui? Ses dispositions et ses lois ne sont plus en phase avec la réalité de la femme tunisienne, notamment ouvrière et rurale, et ne répondent plus totalement aux besoins des générations actuelles et futures.
 

A l'opposé de ceux qui rêvent de le faire sauter, les éclairés et les modernistes aspirent à le consolider et à le mettre à l'air du temps, pour qu'il n'y ait plus de laissé Es pour compte. L'égalité avec l'homme ne saurait être si le droit à l'émancipation n'est pas assuré à toutes les femmes.


Bonne fête Mesdames !